Sévérités inquisitoriales

par | Juin 5, 2018 | Editos | 0 commentaires

Psychanalyste et écrivain, Michel Schneider* dit dans Le Point du 17 Mai : « si vous avez à faire à un juge aux affaires familiales, vous avez de grandes chances de tomber sur une magistrate…. Un peu de mesure, quand au nom des violences faites aux femmes, on sanctionne l’outrage que serait toute expression du désir masculin. « Salauds de pauvres » disait Coluche. A en croire la vague d’indignation de certaines féministes, on dira bientôt « Salauds d’hommes ».

(* : la Confusion des Sexes, Flammarion)

Les mœurs varient selon les époques et les peuples. Selon Anatole France : « Les mœurs présentes, on les appellera barbares quand elles seront des mœurs passées ».
Les habitudes des français ont formidablement changé en matière de couples. Ces changements sont aussi la conséquence des contraintes légales. Le despotisme judiciaire a l’arrogance  de l’élite, il n’a que faire de la sociologie. Il fantasme l’intimité conjugale pour imposer son pouvoir.

Les envies du couple (vivre ensemble, faire des enfants, s’enrichir, se séparer…) sont sous la gouvernance étatique.  « Les peuples jugent assez répugnantes les admonestations morales venues des autres »  déclare Chantal Delsol de l’Institut. L’aboulie, que combat notre jeune Président, est aussi dans la dictature féminisée du divorce judiciaire.

Oui, indiscutablement « l’Europe se perd en étouffant les peuples » ; Oui, la Justice française se fourvoie en mettant le nez dans l’essentiel de la vie des citoyens, en les empêchant de s’émanciper.

Les juges du divorce, majoritairement femmes, sont héréditairement traumatisées par un patriarcat désuet. Patriarcat qui les confronte quotidiennement à une identité culturelle qui n’est pas celle de notre société évoluée.

La misandrie des juges aux affaires familiales sert de pathos à la frustration féministe. La magistrature tend à masquer ce sentiment non professionnel par la défense de « l’autorité de la chose jugée » et l’indépendance souveraine du juge. Les parlementaires législateurs, nos représentants, ne cessent depuis 20 ans de fustiger les excès passionnels des juges. Plus de la moitié d’entre eux sont aussi divorcés et, contrairement aux juges, ils sont paritairement de sexe masculin.

Il y a une résistance forcenée à la révision du montant des rentes prestation compensatoire depuis la loi de 2004. A cette époque, plus de 50 000 justiciables, à 98% hommes, sont sous le coup d’une décision de justice leur imposant de payer une rente viagère représentant 30 à 50% de leurs revenus.

Cette révision législative, pourtant soutenue par des jurisprudences de cassation, a peu d’effets.

Environ 4% des rentes ont été supprimées ou diminuées en 14 ans…

Nous avons de nombreux jugements, y compris de Cours d’appel, qui reviennent obstinément sur une vie post divorce de 20 ou 30 ans. Les responsabilités individuelles ou environnementales (macro économie, politique, réglementation, santé, solidarité …) sont occultées, consciemment ou non. Le débiteur divorcé depuis 25 ans doit-il être le responsable actualisé de la situation de son créditeur qui a eu la volonté ou non d’améliorer sa propre vie ?

Je travaille à un recueil d’inconséquences dans les motifs des juges, en matière de divorce.
Ces « motifs », qui sont censés expliquer la décision du juge, sont souvent hors de toute logique déductive et n’affirment que l’impérium antique.

Tout récemment, en Cour d’appel d’Aix en Provence et de Rennes, à la question simple et légitime : « faut-il supprimer la rente qui pèse lourdement, depuis 25 ans, sur les ressources de Monsieur, retraité ?  Cette rente capitalisée (versée et restant à verser) représentant au moins 7 fois le montant moyen  accordé aujourd’hui, dans les mêmes conditions de divorce. »
Voici un extrait des réponses réelles apportées dans la motivation du juge :
-« Ses besoins n’ont pas évolué et il ne souffre d’aucun problème de santé » (il s’agit de Monsieur bien sûr)
-« Monsieur s’est remarié le 26 Août 20.. avec Madame… »
-« Elle fait état de la nécessité d’acquérir un appareillage auditif… » (il s’agit de la crédirentière)
-« Le montant de la pension perçue par Monsieur est particulièrement élevé par rapport à la moyenne de la population française en position de retraite »(pourquoi pas la rente par rapport à la moyenne versée?

Enfin, un florilège en matière de motifs de cour d’appel, me concernant, il y a quelques années :
-« Il propose en de brèves conclusions non exhaustives de se libérer de son obligation… »
-« Il propose à la location une série de prestations de grand standing » (appréciation spécifique du juge)
-« Il fait en capital une offre dérisoire qu’il est à même de payer (dérisoire par rapport à quoi, nul ne sait !)
-« C’est une rentrée d’argent importante, un héritage par exemple, qui permet au débiteur de la rente de se libérer de son obligation en une seule fois » (inventer un héritage ? Pourquoi pas le loto ??)
-« des photographies produites montrent que les bâtiments ont été restaurés »(des modifs sur une photo ??)
-« L’intimée produit des publicités pour des locations qui démontrent la rentabilité de telles entreprises » (tout le monde sait que la rentabilité d’une entreprise dépend de la…publicité !)
« Il est habile négociateur et financier » (le mal ou le mâle sublimé pour le remorquage patriarcal)

Je suis obligé de vous faire grâce de l’avalanche de chiffres et d’évaluations amenée par les avocats et traduite dans le jugement. Comment, objectivement, le(la) juge peut-il se déterminer ? et par rapport à quoi ??  Les Einstein de la mathématique sociale se couvrent en noyant le poisson sous un déluge de données, toutes aussi subjectives. De toute façon, on fait l’inverse de la logique déductive, on façonne ses arguments (motifs) en fonction de l’objectif fixé : ne pas supprimer la rente !  Pire, je crois : on énumère un maximum de données et on dit :  « c’est comme çà, na ! »

La justice ne sort pas grandie de ces ordalies sexistes.
Les juges du divorce ne représentent plus personne, ils ne représentent qu’eux-mêmes.
Derrière l’outrance compassionnelle se cache la libido de commissaires inquisiteurs qui participent à la propagation du rouleau compresseur populiste.
« L’autoritarisme ordinaire repose sur la peur du nouveau et la négation de demain »  Philosophe européen.

Le législateur doit inscrire l’union de deux personnes dans un vrai contrat incluant une clause de rupture, la justice n’intervenant qu’en cas de non respect de ce contrat synallagmatique.

La révision des rentes ne doit plus faire l’objet d’un inventaire à la Prévert des situations éloignées du divorce, mais simplement, chez un notaire, établir une comparaison entre le montant versé et restant à verser (espérance de vie de la crédirentière) avec les montants en capital versés dans les mêmes conditions de divorce d’aujourd’hui (open data).
La rente est simplement supprimée quand son montant capitalisé est supérieur. Un capital complémentaire est proposé quand elle est inférieure aux moyennes.

« Il ne faut pas devenir une partie prenante du drame qui se déroule devant vous »  Olivier Leurent, directeur de l’Ecole nationale de magistrature.

 

Guy Benon

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