Monsieur le Président,
Je vous adresse cette lettre ouverte avec beaucoup de conviction et pour vous informer, vous et votre cabinet, d’un processus législatif resté inachevé.
Les équipes de Madame Taubira, au moment du « mariage pour tous », ont travaillé avec notre collectif (divorce-coaching) à l’amélioration des textes et lois sur le divorce et, en particulier sur la révision des rentes viagères, déjà entreprise dans la loi de 2004.
Comme beaucoup de français, j’observe votre action et celle du gouvernement. Je constate que vous utilisez habilement la pédagogie, même si parfois vos expressions choquent, elles laissent quelque chose de subliminal, comme pour la publicité (j’ai eu des postes clé chez Unilever et Danone).
« Schumpeter va très rapidement ressembler à Darwin« . Sans doute la destruction créatrice contre la loi du plus fort. La vie naturelle de l’économie contrainte par des intérêts particuliers.
Moi, je dis souvent : « mieux vaut apprendre à pêcher que de donner un poisson ».
Je vous ai serré la main quand vous êtes venu à Forcalquier avec Christophe Castaner. J’habite à 15 minutes de cette ville. Pour moi, vous êtes assurément plus prés des grands managers que j’ai rencontrés, que des politiques qui n’ont jamais eu de rôles importants dans des entreprises majeures. Mais je n’ai jamais éprouvé aucune idolâtrie.
Nos Institutions ont du retard par rapport à vos ambitions. J’imagine que les ministres ont fort à faire pour convaincre leurs équipes opérationnelles. Les lois et ordonnances peuvent accélérer… si elles sont explicites et contrôlées dans leur exécution.
Madame Taubira, en son temps, a aussi bousculé les conservatismes. J’ai rencontré ses conseillères famille, place Vendôme, en 2013, 2014 et 2015, pour améliorer les textes issus de la loi réforme de 2004. Soyons clairs, les lois ont été mal écrites. On ne peut réviser les prestations compensatoires viagères, qu’en cas de « changements importants« , « d’avantage excessif » ou « exceptionnellement »…
L’appréciation judiciaire s’était satisfaite de cette large approximation pour refuser massivement des révisions qui ne correspondent pas à leurs valeurs protectrices de la chose jugée. Le législateur, pressé par la société, s’est démuni par son manque de rigueur et de précision. L’ambiance confine au statu quo, à l’immobilisme de la rente perpétuelle.
En 2015, la loi de modernisation et de simplification va nous aider à glisser un amendement plus quantifié : prise en compte des montants versés et durée de la rente. MAIS !… l’inachevé est là : le juge prend en compte les 50 ou 500 000 versés et dit, non il n’y a pas de changements « importants » ou d’avantage « excessif ». On se moque du justiciable, et on bâtit des grattes ciel de discrimination et de disparités d’une juridiction à une autre. Un point pour le juge, zéro pour le législateur, représentant le peuple.
En Octobre 2016, nouvel espoir pour les débirentiers majoritairement à la retraite. La loi numérique, l’open data, qui va permettre de comparer et d’ajuster des situations à des peines qui vont de 1 à 6 pour les mêmes conditions de divorce.
Le compteur des révisions reste en panne, la magistrature feint de ne pas comprendre. Celui des ex qui gagne le plus doit continuer à payer l’autre. Cela dure parfois depuis… 20 ans, 30 ans, et les sommes confiscatoires figurent parfois des bigamies financières.
La contribution des retraités aisés à l’équilibre « recettes-dépenses » est aussi acceptable que celle de la fonction publique. Mais une minorité d’entre eux (50 000) cumulent les charges.
Quand nos prélèvements obligatoires sont à 47% du PIB, les rentes viagères représentent en moyenne 30% des revenus des débiteurs, qu’il faut ajouter aux impôts et taxes. C’est « Cuba sans le soleil » ??
La réforme de la justice en cours prévoit la révision des pensions alimentaires sans juge. Le ministère ne pourrait-il pas ajouter les rentes viagères pour être cohérent ? Et enfin simplifier un recours en révision qui n’aboutit pas depuis 14 ans !
Aujourd’hui, la loi privilégie le versement one shot d’un capital, plus juste qu’une rente très aléatoire, qui promeut l’immobilisme social. Les divorces judiciaires diminuent parce que la loi émancipe enfin les couples. Les rentiers de la prestation compensatoire doivent aussi « traverser la rue » pour retrouver leur dignité et leur indépendance.
La justice doit intégrer cette auto responsabilité au lieu d’une compassion sexiste (80% des JAF sont des femmes) qui enlève la fierté des deux parties et fomente des dissensions épouvantables dans les familles. Après Outreau, la comparution prochaine du syndicat de la magistrature fait douter le justiciable-contribuable d’une impartialité professionnelle.
La révision des rentes viagères doit être examinée simplement et mécaniquement par un officier ministériel. La référence quantitative c’est les données juridiques de l’open data.
Je vous remercie de votre attention, en espérant que vous mettrez en œuvre cette justice et dynamique sociales.
Respect sincère,
Guy Benon
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